mardi 8 septembre 2009

du 26 août au 1 septembre 2009

ÉDITION SPÉCIALE : QUAND LA HOULE NOUS PREND...




Avant d'embarquer sur le catamaran de Glen l'australien, nous passons quelques jours à Jakarta. La ville est énorme, et probablement la plus visiblement polluée qu'on ait jamais vue: les larges caniveaux putrides sont remplis à ras bord d'une soupe brune de déjections, d'ordures et de plastiques divers macérant au soleil, égouts qui se vident dans les rivières, qui elles se jettent dans la mer... L'air est surchargé d'un voile noir épais, la circulation est très intense: des milliers de touc-toucs et de scooters fumant noir s'entassent jusque sur les trottoirs (il faut préciser que jusqu'ici en Asie les trottoirs sont impraticables pour les piétons, ils servent à tout sauf à trotter, sont envahis d'étals ou de voitures en stationnement, et ici carrément par la circulation...) et quand le feu passe au vert c'est un chaos sonore à côté duquel un concert de crust sonne comme une douce berceuse... Pollution de l'eau, de l'air, pollution visuelle et pollution sonore... un festival!



Donc on est bien contents d'embarquer à bord du Highway Star et de prendre le large!



Sur à peu près 15 miles nautiques (28 km terrestres) la mer est une véritable poubelle. Notre rôle, assis à l'avant du catamaran, est de contrôler que nous ne passons sur aucune corde ou filet qui pourrait se prendre dans les hélices des moteurs... C'est dans cette eau saturée de déchets que les pêcheurs lâchent leurs filets... Nous sommes impressionnés par la concentration en navires en tous genres, pétroliers, bateaux de commerce, ferries, bateaux de pêche... Je me dis que si on collait tous les bateaux du monde côte a côte au milieu du pacifique ça créerait carrément un continent... L'homme est partout, il occupe tous les espaces et les saccage allègrement (au nom de quoi à votre avis?) Triste réalité, pénible à voir, mais l'avoir vue nous permet de prendre conscience de l'ampleur des dégâts (auxquels il faut remédier biensûr!)


huile déversée dans la mer...


Puis nous atteignons enfin le large, là ou la pollution ne se voit plus mais aussi là où le roulis se fait plus important! La mer est plus grosse que lors de notre première expérience, même si c'est loin d'être l'océan... mais après avoir discuté cinq minutes avec Glen, je commence à avoir mal au ventre. Je retourne donc me poster à l'avant du bateau, mais le mal est fait, et la nausée s'installe...

A l'avant je suis en plein vent, ce qui a tendance à améliorer mon état, mais c'est aussi en plein soleil. Et on est pas loin de l'équateur! Mais à l'idée de marcher jusqu'à l'arrière pour attraper la crème solaire j'ai envie de vomir alors je repousse le moment redouté... Puis Yohan m'aide à venir à l'arrière pour mettre de la crème (il est obligé de me la mettre, je ne peux pas regarder en bas). Je m'assois un peu à l'ombre (les seuls endroits à l'ombre sont la cabine, où il est hors de question que j'aille, et, seulement le matin, l'espace de pilotage qui est en contrebas donc sans air ni visibilité sur l'extérieur) Et là d'un coup ça me tourne, ça monte, ça monte, et blurgh ça sort... Je vomis trois fois puis je suis inservable alors je m'allonge et je dors, et petit à petit le soleil vient se poser sur moi mais je suis incapable de bouger. Tout me parait insurmontable, même manger, surtout manger! Yohan me force à boire de l'eau pour que je ne me déshydrate pas.



Quarante-huit heures de mal de mer où je ne peux rien faire, Yohan et Glen se partagent donc la surveillance de la navigation et c'est plus difficile car je ne suis là ni pour faire mon quart la nuit, ni surtout pour traduire l'anglais australien de Glen à Yohan...



Glen décide de s'arrêter près de l'île de Zkpltwr pour voir si mon état s'améliore et pour prendre du fuel. Ca va très vite mieux, j'ai l'estomac et les tripes en compote, mais la nausée m'a quittée.




Nous l'avions remarqué dès notre première rencontre, Glen est un peu maniaque... Nos effets personnels ne doivent pas dépasser un certain volume (cube de 30cm de côté), pas de bouteille plastique, ni pour boire, ni pour les toilettes (nous nous sommes adaptés à L'Asie et n'utilisons plus de papier...). Il y a aussi la gazinière, il faut faire très attention car il serait fâcheux de faire exploser le bateau. C'est sûr... le problème c'est que Glen est derrière nous au moindre mouvement, ça tu le mets là, ça tu fais comme ci, ça tu fais comme ça, il va jusqu'à m'expliquer comment faire la vaisselle... les verres d'abord, la casserole à la fin, et avec la brosse s'il vous plaît, et pas l'éponge! Ah...

Yohan est mal à l'aise et n'ose plus rien toucher, se sentant (et étant effectivement) surveillé et entravé dans sa liberté de mouvement. Il n'ose même pas se faire à manger... Forcément sa spontanéité s'évapore...

Alors que je me remets doucement de ma sale expérience, Glen me demande soudainement si Yohan a appris à dire "s'il te plaît" et "merci" en anglais. Je dis bien sûr et commence à sentir comme un malaise... Évidemment le dialogue s'était coupé entre Yohan et Glen à cause de la barrière de la langue et parce-qu'on ne se sentait pas les bienvenus dans son espace. A partir de cette remarque, plus de dialogue du tout... Moi je commence à stresser et mes intestins se liquéfient à chaque nouveau stimulus... Super pour reprendre le contrôle de mon corps...

Mais revenons à la vaisselle. J'avais complètement oublié que nos amis les anglo-saxons (dont je suis, certes!) ne rincent pas la vaisselle après l'avoir lavée avec une bonne giclée de détergent chimique, ce qui laisse un agréable arrière goût de citron synthétique gélifié sur tous les ustensiles et donnerait la nausée à plus d'un latin... Je suis prête bien sûr à me plier au règlement qui régit ce bateau, mais je raconte sur le ton de l'anecdote que pour un français c'est dégoûtant, et que si ça ne tenait qu'à moi je la rincerais (à l'eau de mer bien entendu!), mais que je ferai comme il voudra, c'est juste histoire de le dire, et d'en rire... Là il me rétorque en gros que tant que je mangerai de la farine blanche je n'aurai rien à dire sur le sujet (la farine blanche a été sélectionnée, trafiquée, blanchie année après année, est une cause cachée de bien des maladies: diabète, allergies, cancers... et est certainement plus toxique qu'un peu de liquide vaisselle, je veux bien le croire, mais l'idée de manger du liquide vaisselle... beurk...) Il ajoute qu'un peu de détergent me ferait certainement du bien et m'endurcirait un peu... Son argument final: tu es sur un bateau australien, tu fais australien!!! humpf d'accord...

A partir de ma petite remarque sur nos petites différences culturelles, c'est ma relation avec Glen qui se détériore, car à partir de là il m'enverra constamment des petites piques comme: "puisque tu es si intelligente!" ou "tu fais comme tu veux! c'est toi l'écolo!"... Je décide de ne pas me formaliser, et de continuer de tenter de rétablir la communication car mes intestins fragilisés ne supportent pas cette tension...



Le lendemain il me dit pour la troisième fois de ne pas laisser le gaz ouvert quand il n'y a pas de flamme (sans blague!) car quand tu possèdes un bateau d'une telle valeur tu dois prendre d'infimes précautions... Je tente de le rassurer en lui disant que j'ai l'habitude du gaz, que dans ma yourTA YOURTE!!! MAIS TA YOURTE ELLE VAUT MÊME PAS UN PLACARD DE MON BATEAU!!! Là je suis abasourdie, devant tant de bassesse je ne sais que dire... Pour Yohan c'en est trop, il décide de débarquer ici, tant pis, il ne le supportera pas un jour de plus...

Voyant comment Glen se permet de me parler, et comment je suis (physiquement) mal face à lui, Yohan sort de ses gonds et lui sort ses quatre vérités... Enfin il essaye, car Glen ne veut rien entendre, et lui coupe sans cesse la parole pour lui dire "inutile d'en dire plus, je vous débarque!"... Glen a sa lampe frontale allumée et aveugle Yohan lorsqu'il le regarde alors Yohan lui demande de la baisser S'IL TE PLAIT mais Glen s'y refuse, alors Yohan allume la sienne. Là, Glen se lève et le menace de son équerre en plastique: "tu fais pas ça dans mon bateau!" tentant de prendre le dessus, mais voyant que là il a quelqu'un en face de lui, il perd son assurance. Extinction des lampes, Yohan suggère de discuter en adultes intelligents afin que chacun puisse exprimer son ressenti. Impossible, Glen ne veut rien entendre et tente de se sortir de cette situation en nous empêchant de parler. Il veut nous voir disparaître au plus vite.

Yohan parvient tout de même à lui dire qu'il y a la politesse (la forme) et le respect des autres (le fond), que sa façon de me parler n'est pas acceptable, et que de toute évidence il a BESOIN d'un équipage mais ne VEUT pas accueillir des gens dans son espace... Yohan, énervé, a retrouvé son anglais, la barrière de la langue s'est effondrée, mais ses paroles se heurtent à un mur...

Nous sommes donc débarqués à Zkpltwr... Là c'est Glen qui est emmerdé, car il n'est pas capable de naviguer tout seul pendant deux jours sur son catamaran équipé tout confort (enfin chacun son idée du confort) et toute sécurité...

Aargh! J'ai oublié ma crème solaire à bord! Je sais... ma fierté m'aurait dicté de la lui laisser... mais c'est un super écran minéral bio vegan que je trimballe depuis plus d'un an, et vu le gars, il serait bien fichu de la jeter par dessus bord... Pour l'anecdote, il refuse de pêcher le moindre poisson mais achète du thon en boîte... pour lutter contre la surpêche y'a pas mieux...

Je lui téléphone donc pour lui demander de me la ramener la prochaine fois qu'il vient à terre, et il m'envoie un "je suis sûr que cette crème a une haute importance dans ta vie (minable, sous entendue) et qu'elle vaut une fortune!" Je dis oui et il me dit qu'il la déposera au magasin. Je lui demande lequel et il me dit qu'il voit pas pourquoi il devrait se prendre la tête pour moi et moi je ne dis rien (j'ai vraiment un problème pour me faire respecter), je raccroche, et je fonds en larmes... Yohan ne supporte pas qu'il me parle comme ça alors il prend le con (comme il dit!) et décide d'aller l'attendre sur le quai...

Oui je sais... C'est pas très joli, je pense que c'est tout sauf la bonne solution... mais à force d'essayer de tempérer je suis devenue obstrusive... alors je le laisse faire... Et le gars, qui n'entendait rien de ce qu'on essayait de lui dire pour rétablir notre intégrité dans ce rapport humiliant, dans cette lutte de pouvoir psychologique qu'il avait instaurée, s'imposant en dominateur arrogant dès le début, bein il s'est pris deux ou trois coups, et il a tremblé... Pas très reluisant certes...



Avec du recul et après pas mal de bla bla, nous sommes absolument et complètement conscients que rien ne justifie la violence physique (ni non-plus la violence psychologique d'ailleurs) et regrettons ce geste. La violence c'est l'échec de la colère. Nous ne sommes pas parvenus à nous faire entendre et respecter. La violence n'a fait que décharger une tension, en aucun cas elle ne nous aura servi à être écoutés, ou respectés... Et c'est même notre respect de nous-mêmes qui en a pris un coup... Lui de son côté, après un tel geste, n'aura que peu de chances de pouvoir regarder sa propre violence (verbale), et de se remettre en questions...



5 commentaires:

  1. votre réaction est naturelle , car le respect est valable pour tout le monde .

    je n'apprécie pas les personnes du genre de GLEN .
    Vous avez eue raison et pourtant je déteste la violence .
    je vous trouve formidable et courageux .

    a bientot bisous la malie

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  2. C'est bien mon Yohan, je suis fier de toi, c'est ton côté oi qui reprend ses droits, fallait le jeter aux requins ou aux pirates ce gros con des tropiques ah ah Consultez vos PM sur VF, je vous ai laissé qlques pistes pour survivre en Indo. A vot service pour plus de renseignements. Bon rétablissement Lara.

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  3. Toujours compliqué de se trouver en face de gens incapables de se remettre en question sur quoi que soit =S
    Par contre l'histoire ne dit pas ce qu'il est advenu de ta crème solaire, ni si Yohan lui a dit "merci en anglais" apres lui avoir collé son poing sur la g... .
    On le dit souvent : "des cons il y en a partout sur la terre", alors normal quelque part d'en croiser un de temps en temps, même si c'est pas très rigolo !
    Bonne continuation a vous. Des bises !
    Cécile & Co

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  4. yes yoyo il a du bien chercher ce gars parce que j'ai jamais vu yoyo frapper qui que ce soit ... lara t'a du vraiment souffrir sur ce coup... bravo yo non mais attention yo quand il s'énerve c'est une vrai hyene... non mais ..

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