mercredi 27 janvier 2010

WEST PAPUA:
du 1 au 10 janvier 2010:




Nous avons envie de nous enfoncer dans les terres de Papouasie. Les "colons" sont installés principalement sur les côtes, l'atmosphère y est donc plutôt indonésienne.




Dans les montagnes, la population est d'origine, de race négroïde.



En Papua se trouvent quelques unes (Korowai, Asmat...) des dernières tribus vivant dans la jungle à l'écart du monde "civilisé" Le peu de tourisme qui passe ici est tourné vers la forêt encore vierge, les montagnes, mais surtout la rencontre de ces tribus au mode de vie ancestral, qui ont vu peu, voire aucun blanc... Mais s'il y a bien une chose que nous avons comprise tout au long de notre voyage, c'est que le tourisme détruit son propre objet...

"[...] tous les anthropologues et les écrivains sont responsables d'une infection mortelle: faire connaître un endroit contribue à la destruction de ce qui le rend intéressant."
Nigel Barley L'Anthropologue Mène l'Enquête

C'est pourquoi pour nous hors de question d'aller à la rencontre de ces tribus qui vivent à l'abri de notre monde matérialiste (hors de question de les contaminer avec notre mode de vie dénué de sens et de risquer de les déconnecter de leur réalité). C'est une responsabilité lourde de conséquences que nous ne voulons pas prendre, même si cette rencontre serait sans doutes enrichissante pour nous... Mais on pense que c'est moins nocif de regarder Nicolas Hulot!!!)

Attirés pas les plus hautes montagnes D'Asie du sud-est, nous nous engageons donc dans les terres, direction une ville choisie au pif sur la carte, d'où il nous paraissait possible de mirer le Puncak Jaya (4884m).



Le trajet (250km) se fait en 4x4 pick up, 4 passagers dans l'habitacle (dont moi), et environ 7 à l'arrière, en plein vent assis sur des planches sans dossier (dont Yohan!). Bien entassés, sous une chaleur écrasante, nous partons... La voiture démarre, l'ivrogne dont le chauffeur, indonésien, essaye de se débarrasser depuis deux bonnes heures, se jette de nouveau à bord, et c'est parti... On y va!





Wah! C'est beau, les montagnes à perte de vue couvertes de jungle! Puis peu à peu la piste prend le dessus sur la route (de plus en plus défoncée) et ça saute de plus en plus: Yohan à l'arrière, se cogne et se casse le derrière... 13 heures de route comme ça, imaginez le calvaire! Nous franchissons des ponts en bois qui semblent à la limite de l'effondrement, effleurons des ravins où la route s'est écroulée, traversons (dans l'eau) de larges rivières à fort courant... Wah ça nous rappelle nos débuts!!!



Puis la nuit tombe... Huit heures dans ce cahot, impossible de dormir... Le chauffeur depuis quelque temps arrête tous les véhicules qu'il croise et demande quelque chose que je ne comprends pas... Et là il s'arrête, sépare ses gros billets des petits, et repart... Bon soit! On a l'habitude de ne pas tout comprendre de ce qui se trame autour de nous!

Nous arrivons sur un plateau et abordons un village... Tout à coup, droit devant, des ombres se détachent de l'obscurité... C'est un barrage... un barrage de fortune constitué de grosses pierres sur lesquelles sont assis des gens. Coup de frein du chauffeur. Un papou, énervé et visiblement ivre, frappe à la fenêtre, le chauffeur baisse la vitre, le papou, agressif, exige de l'argent, le chauffeur refuse. L'autre menace, s'agite, gueule pendant que d'autres s'excitent autour de la voiture. Mon coeur s'est mis à battre violemment (Putain mais qu'est-ce qui se passe?!?) Le chauffeur tente de discuter mais le ton continue de monter. J'ai peur. Les assaillants ordonnent aux passagers de descendre, et quelques uns sautent du véhicule (ce sont des papous, eux aussi...) et interviennent, tentant de calmer le jeu... Une atmosphère de violence règne. Le plus virulent (le chef de la bande?) ayant apparemment aperçu Yohan dans l'obscurité tente d'éclairer son visage avec un briquet, gueulant toujours, mais son briquet ne s'allume pas (merci forces cosmiques!) et un autre passager détourne son attention (alcoolisée, rappelons-le!) Ouf! A l'avant, derrière les vitres teintées, je suis cachée (mais terrorisée à l'idée que l'un d'entre eux n'ouvre la portière). Le "chef", en colère, part devant sur la route. Le passager ivrogne du début, qui a joué un rôle modérateur (même race et même état) lors de l'altercation pousse les pierres du milieu de la route et saute dans la voiture, qui accélère d'un coup, sous les cris et coups des racketteurs. Arrivés au niveau du chef, qui se tient au milieu de la route une pierre à la main, le chauffeur doit freiner à nouveau et, entre accélération et freinage, prétextant un "j'ai des passagers à conduire, je reviens, je reviens" parvient à s'esquiver... Ca y est on est sortis de ce guet-apens!

Hé bein non! Un deuxième barrage! Sans pierre celui-ci, alors le chauffeur, maintenant sa vitesse autant qu'il peut, parvient à passer. Nous évitons ainsi de nouvelles violentes démélées. La voiture se prend tout de même quelques coups et on repart cette fois pour de bon...

A partir de là à chaque attroupement sur la route (c'est monnaie courante ici) mon corps tout entier se tendra... Yohan me racontera ensuite qu'il a eu bien peur, lui aussi...

Nous arrivons à notre destination au beau milieu de la nuit, le chauffeur nous propose de dormir dans le 4x4, il fait froid, nos petites laines sont au fin fond de nos sacs à dos attachés sur le toit...
Nuit difficile donc...



Le matin, rituelle mission hôtel... Premier: 300 000 rp (20 euros!!!) What?!? C'est très cher, 6 fois notre budget habituel! Elle descend à 250 000... Heu non... Y'a pas moyen... Deuxième hôtel: 300 000 la chambre la moins chère (c'est à dire sans salle de bains privative). "Hein?!?" Non non hors de question! On va bien trouver quelque-chose de correct... Passant devant le commissariat nous montrons notre permis de circuler (c'est obligatoire) et leur demandons s'il y a un hôtel pour locaux, ils nous disent qu'il n'y a que deux hôtels ici, et que c'est le prix... et mentionnent vaguement l'église catholique (?)



Heu bon on y va, on verra bien ce qu'il y a... Effectivement à l'église catholique on nous donne une chambre, mais y'a pas moyen de savoir le prix... Nous n'insistons pas trop, c'est peut-être gratuit? ou prix libre? Après tout c'est une église...


C'est ici que nous rencontrons Yulianus le jardinier qui entretient le lieu...



Puis son beau-frère Daniel, qui nous propose de nous conduire dans son village de l'autre côté du lac. Nous acceptons, mais c'est sans compter une rencontre (fortuite?) avec la police qui nous dit que nous ne pouvons pas y aller...



Nous sommes très surpris et Daniel est en colère, le flic nous convoque au commissariat pour nous informer que notre surat jalan (autorisation de circuler) se limite à la ville, pas à la région, et que nous ne devons pas nous en éloigner. Il nous dit que c'est dangereux, qu'il y a beaucoup de primitifs et de séparatistes dans les alentours... Nous n'y croyons qu'à moitié, mais nous n'avons pas le choix... Nous devons nous résigner...

Nous retrouvons Daniel et Yulianus à l'église et lors d'une longue discussion nous découvrons le sort des papous dans un pays colonisé par les Indonésiens qui en exploitent les richesses sans en faire profiter les locaux. Un pays administré par les indonésiens qui traitent les populations d'origine comme des brutes (lien survival france). Nous découvrons le désir d'indépendance des papous et nous sommes touchés par leur situation: dépossédés de leur terre... Ils ne détiennent rien: ni commerces ni administrations... et ne sont pas libres de faire découvrir leur pays aux voyageurs, parce que l'armée entend tout contrôler.





Bon bein merci à la police, nous ne pouvons pas marcher dans les montagnes avoisinantes ni visiter les petits villages alentours... (En même temps nous n'étions pas sûrs d'être cohérents en y allant... Mais d'un autre côté il est injuste que le contact entre le blanc et le noir soit régulé par les indos...)





Nous passons donc quatre jours dans la ville, faisons deux petites randonnées (sans trop nous éloigner...) Autour de la ville c'est magnifique, et la rencontre avec la population est forte, que ce soit dans les sourires ou dans l'étonnement de nous voir. Si nous nous arrêtons dans la rue pour discuter, en une minute nous nous retrouvons avec un attroupement de 20 personnes autour de nous!!! Ceux qui parlent un peu anglais nous suivent partout et ne nous lâchent pas d'une semelle, d'autres viennent juste toucher notre peau... en toute simplicité...


au marché








notre ami Daniel












pêcheuses


La surprise de fin de séjour à l'église, c'est le tarif demandé: 150 000 par personne!!! Yulianus est gêné tout de même et nous dit de payer ce qu'on peut, alors on paye 100 000 pour deux... Bon compromis...


Légère appréhension pour le retour en 4x4, bien qu'atténuée par le fait que cette fois nous voyageons de jour. Encore un barrage, que le chauffeur parvient à passer sans s'arrêter. Climat de violence: coups sur les vitres de la voiture: sursaut, tension. Puis un barrage de jeunes armés d'arcs et de flèches pour prendre d'assaut la voiture, et on se retrouve avec 15 personnes supplémentaires (ça fait presque 30 en tout!) et on n'avance plus mais ça leur est complètement égal. On roule à deux à l'heure jusqu'au prochain village (le village critique de l'aller). Nouvelle tentative d'invasion du véhicule mais le chauffeur explique qu'il doit s'arrêter pour prendre des passagers un peu plus loin. Les papous, furieux, doivent se résigner, mais ils suivent la bagnole jusqu'à la station de police. Nous y faisons une halte, qui donnera lieu à de vives négociations, pour mettre de l'ordre dans les passagers (permettre à ceux qui ont payé d'entrer dans la voiture!) sous le contrôle d'un impressionnant papou armé d'une matraque qui sert d'intermédiaire entre les forces de l'ordre et la foule (bordélique, agitée, désorganisée, ingerable...) et se fait payer un petit billet au passage... Bien que nous soyons au commissariat, la police ne fait pas figure d'autorité. Ils sont même en position de faiblesse: peu nombreux, pas rassurés.



Pour pouvoir repartir sans conflit, le chauffeur doit donner quelques billets à des papous ivres...

Pour nous tout ceci n'est pas rassurant, nous plaignons un peu les indonésiens qui subissent ça chaque jour, et ne savons pas trop comment nous sommes perçus par ces rebelles, comme un espoir d'aide extérieure à la libération ou bien comme de l'argent potentiel... Face à des ivrognes, difficile de savoir...



Nous sommes déposés chez l'oncle de Daniel dont il nous a donné l'adresse. C'est une cabane très sommaire, coucher à même le plancher, toilettes un trou dans le jardin, douche au puits.



Il est déçu que nous ne restions qu'une nuit alors nous pesons le pour et le contre et décidons de renoncer à notre plan original (visiter Manokwari, lieu touristique à treks) pour vivre chez des papous et apprendre à les connaître. Nous décidons de rester, mais très vite nous sentons que l'invitation n'est pas désintéressée alors après avoir vu le prix des hôtels, nous tentons la location à la semaine et trouvons une petite chambre vide (pas de lit, juste du carrelage) pour 100 000 la semaine (contre 300 000 la nuit d'hôtel!) Nous passons donc la semaine dans un petit quartier populaire indonésien en plein centre ville, près d'une petite rivière qui fait office d'égout, et de décharge.



On s'habituera jamais à la vue des riverains qui sortent de chez eux, poubelle à la main, et la jettent directement dans la rivière, devant le pas de leur porte...

Il n'y a pas grand chose à faire dans cette ville. Nous nous baladons sur la plage, où notre rivière-égout finit sa course... C'est une véritable déchetterie où les enfants jouent à la marchande avec les flacons et bouteilles vides...







Il fait très chaud et nous nous souvenons avoir croisé pas mal de larges rivières en 4x4, alors nous avons envie de nous baigner... Nous marchons au hasard des kilomètres, demandons par-ci par-là, et nous retrouvons face à des militaires dans leur tour de guêt au coin de leur clôture barbelée... Ils nous font venir et nous disent "c'est loin! pas possible par là!" L'un d'eux nous prie de le suivre... Comme il est sympathique nous y allons et traversons l'immense caserne avec ses complexes sportifs, ses beaux gazons, et, côte à côte, sa mosquée, son église, et son temple hindou! C'est le luxe ici! Il nous conduit à son supérieur qui nous fait monter dans un gros camion de chantier qui va à la rivière! Nous sommes déposés près d'un petit sentier qui mène à une cascade!!! Là: baignade super fraîche qui nous fait renaître!!! Un pur bonheur!






Mais c'est pas tout ça, nous sommes en zone interdite et devons pointer à notre retour!!!


un cimetière chrétien







La petite semaine ici est l'occasion de rencontres sympathiques avec des papous et des indonésiens, deux parties en conflit mais que nous apprécions chacune, car au fond, toutes ces personnes ont un coeur! Les nombreux enfants du voisinage nous font la fête à chacun de nos passages, ils sont ADORABLES!!!






Puis entrant au Warnet (cybercafe) nous nous retrouvons (presque) nez-à-nez avec un blanc! Wah ça faisait un moment! "where are you from?" "from France and you?" "from Russia!" et bla bla Vasily nous raconte qu'il voyage à pied et en stop, et dort soit invité chez les locaux, soit dehors!!! Ca c'est du crevard! Son sac à dos est minuscule... Humpf finalement on ne s'encroûterait pas un peu???

Nous l'invitons à dormir chez nous la dernière nuit et il décide de nous suivre à Makassar pour faire étendre son visa...

Vasily nous propose d'aller au port (trentaine de kilomètres) en stop, nous partons mais il commence à faire nuit. Petit arrêt près du terminal des ankutan (mini-van transport public) pour mettre notre poubelle au feu, et Yohan se fait interpeller par un gros papou ivre et énervé qui déclare travailler pour le gouvernement et exige nos passeports. Hors de question de donner nos passeports à un homme dans cet état, nous refusons. Il s'énerve encore plus et gueule, montrant des signes de violence. Vasily intervient, il est carré et imposant et le gars a l'air intimidé, du moins un court instant. Nous reprenons notre marche et le gars nous court après en hurlant et menaçant. Un attroupement se forme autour de nous, tous les ojek (mobylette taxi) s'arrêtent et les passants aussi. Et la police... Nous en profitons pour nous échapper et reprendre notre route jusqu'au port avec l'aide généreuse d'une amie de Vasily.




Vasily


Steven


Yohan!

mercredi 20 janvier 2010

PAPUA & PAPUA NEW GUINEA,
du 16 décembre 2009 au 1 janvier 2010:

au stand de pétards et feux d'artifices...


Après un nouvel an des plus misérables, seuls dans une maison inhabitée loin de tout, sans rien à manger, nous sommes nostalgiques de nos familles et de nos amis (et des huîtres au vin blanc, dit yohan...). Alors nous allons, exceptionnellement, vous solliciter... Combien d'entre vous lisent encore notre blog? Qu'en pensez-vous? Merci de répondre à ces deux questions en toute sincérité, le blog nous prend beaucoup de temps, d'énergie et de patience... (Si vous n'avez pas de compte google ou une autre openID, vous pouvez nous envoyer un e-mail!).


au travail...


Au début nous écrivions (sur papier) tous les deux ou trois jours, et restituions des anecdotes toutes fraîches dans plus de détails. Aujourd'hui nous faisons toutes les deux semaines à un mois un compte rendu plus général de nos pérégrinations. Nous oublions donc des détails, mais aussi de parler de ce qui nous est devenu normal, à nous, ici, avec l'habitude...

Par exemple: le quotidien du crevard qui cherche une piaule pas cher: arrives à Ambon, nous cherchons un petit hôtel (au dessus d'un resto de poisson grillé) dont on nous a soufflé mot dans le bateau... Après avoir bien tourné avec nos gros sacs, demandant aux locaux qui souvent ne connaissent pas, nous trouvons enfin le bonhomme qui enfume la rue de son poisson grillé (en face d'un magasin de CD qui à violents coups de décibels se fait entendre à des kilomètres à la ronde et nous heurte quelque peu les tympans!) Nous lui demandons: "c'est ici l'hôtel?" (ce n'est écrit nulle part) "non non il n'y a pas il n'y a pas" en secouant les mains, "si si il y a il y a !", nous insistons... "non non, heu non heu petit" "oui oui on veut on veut OK bagus!!!" "ah" il est gêné et son employée fait petite mine en nous conduisant à l'étage... effectivement les chambres sont très sales (murs aux traces douteuses, odeur fongique étouffante) et obscures... Sans compter le bruit du magasin d'en face, de la circulation, et des groupes électrogènes qui pallient aux coupures quotidiennes d'électricité, et les nuées de moustiques dans la salle de bains commune dont l'ampoule est semble-t'il, grillée... mais c'est ça, pour 50000 rp (env 3 euros) ou du propre (relatif) à 150000 rp (10 euros) pour touristes.


vue depuis la piaule à Ambon


Décidément dans les villes du nord de l'Indonésie , pas facile de se loger. A Makassar (Sulawesi) avec Sam et Sarka nous avions galéré pendant des heures, toutes les auberges nous criaient "FULL!" et nous indiquaient le même hôtel pour touristes (cher). Nous commencions à douter qu'elles soient réellement pleines, et devant l'évidence d'une chambre qui se libérait juste, nous insistâmes, pour apprendre enfin que s'ils accueillaient des étrangers (blancs!) ils auraient des ennuis avec la police. Des scénarios de corruption policière et de puissant businessman chinois se bousculèrent dans nos imaginations... Dépités, légèrement inquiets et fatigués (c'est toujours dur ce moment où on se trimballe avec nos lourds sacs de trottoir impraticable en avenue interminable...) et même quelque peu en colère (Sam!) nous avions fini, en nous éloignant du secteur, par trouver deux chambres miteuses à prix correct où on voulait bien de nous! On s'accommoda du groupe électrogène juste en dessous de la fenêtre... Sarka et Sam, eux n'avaient pas de fenêtre...


la chambre à Makassar (la photo ne rend hélas pas l'odeur de champignon...)


la salle-de-bains, typique...
(le seau d'eau fait à la fois office de douche, lavabo, et chasse d'eau)


Voilà... C'est le quotidien du crevard, et de quelques “backpackers” français (les autres nationalités ne marchandent quasiment jamais !?!) - c'est pour ça que c'est reposant de rester deux semaines au même endroit – mais finies les vacances...



Nous sommes à Ambon pour prendre un PELNI direction la Papouasie! (précision géographique: la grosse île de Papua est divisée en deux: à l'ouest la Papua indonésienne, à l'est la Papouasie-Nouvelle-Guinée, indépendante, sous protection australienne. La frontière est une droite verticale qui sépare l'Asie de l'Océanie.)



Dans le ferry, une nuit sur le pont pour cause de dortoir, couloirs, et cages d'escaliers bondés; en pleine saison des pluies nous sommes chanceux et ne subissons pas d'averse...



Puis deux nuits en dortoir (ça y est on a compris l'astuce: il suffit d'aller réserver son lit avant que le bateau ne fasse escale, auprès des passagers qui vont débarquer! C'est l'occasion de redevenir le centre de l'attention en attendant que les places se libèrent!” Le bateau est relativement neuf donc relativement propre. C'est un plaisir!


vue du port de Biak lors d'une escale



Puis nous accostons à Jayapura. La ville, capitale de la province (indonésienne) de Papua, est dans une cuvette: petit centre ville d'où la verdure des collines résidentielles attenantes est toujours visible. Ville dans la jungle! Le visage des papous (aborigènes des villes!) s'illuminent à notre vue, nous scotchent des sourires communicatifs sur la face! Ça fait du bien! Et ils ne cherchent pas à nous arnaquer contrairement à leurs colonisateurs qui sont plus axés business, et (donc?) plus malhonnêtes!


la rivière



Les trottoirs sont assez chaotiques et couverts de tâches rouge vif évoquant des scènes de crime!!! En fait il s'agit de crachats de noix d’arec, improprement appelées noix de Bétel, la drogue locale (au même titre que les cigarettes pour d'autres): ils mâchent la pulpe sans jamais avaler le jus amer ni leur salive, qui est crachée, jusqu'à ce que la chair soit plus ferme. Puis un genre de haricot (ressemblant au châton du saule) est trempé dans de la chaux en poudre et mâché avec, ce qui provoque une réaction chimique qui rend la pulpe rouge vif (ainsi que les dents!) et une petite montée d'un petit quart d'heure où le cerveau est plus léger...





Ils mâchouillent ça toute la journée, nous offrant le spectacle de sourires rouges pâteux! Tandis que nous, nous tournons longuement à la recherche d'une chambre... On nous envoie d'un hôtel à un autre, prix exorbitant ou bien “FULL!”... Retournant à la case départ et insistant, en réalité ce n'est pas full, juste d'un standing qui d'ordinaire ne sied pas au blanc... Sâle (même les draps!), plein de cafards et de moustiques, glauque et sans fenêtre... On est des crevards!!!



dans la rue...

Nous n'avons plus qu'une semaine de visa, alors pour gagner du temps, au lieu de sortir du pays pour y entrer à nouveau, nous nous rendons à l'immigration pour tenter d'obtenir une extension de nos visas en cours, ce qui aurait pour avantage subsidiaire d'économiser une page du passeport dangereusement plein de Yohan! Là nous rencontrons deux blancs (bénévoles dans une association pour la paix et la non-violence) qui nous informent de la nécessité de nous enregistrer à la police sous 24H et d'y obtenir un surat jalan, autorisation de circuler dans tel ou tel district de la province de Papua. On avait oublie ce détail!

Imaginez-vous voyager sans guide! Heureusement notre bonne étoile nous met sur le chemin de personnes qui nous donnent les infos... Vous connaissez la Prophétie des Andes de James Redfield? Pour les hôtels c'est plutôt notre persévérance qui est la clé... Et en ce qui concerne les destinations et visites, c'est le flou artistique!
Sans guide, nous marchons peut être dix fois plus, mais nous apprenons à connaître les vrais prix (qui se révèlent souvent inférieurs à ceux qui figurent dans les bouquins de nos co-voyageurs) et nous laissons plus de place au hasard. Peut être que nous passons à côté de quelque merveille, mais une merveille inondée de touristes à camera n'est pour nous plus que la moitié d'une merveille... Nos merveilles à nous se situent dans le contact spontané, authentique et désintéressé que nous offre le hasard...






Reprenons notre casse-tête visa... Au bureau de l'immigration, donc, les deux bénévoles que nous avons rencontrés nous disent que plutôt que de tenter d'obtenir quoi que ce soit de cette administration à laquelle eux-même se heurtent pour d'autres raisons, le plus simple serait d'aller à la frontière, où nous pourrons obtenir un ticket qui nous permettra d'aller jusqu'à Vanimo, en Papouasie-Nouvelle-Guinée (ou PNG), donc, où se trouve le consulat indonésien, où nous pourrons obtenir notre visa, le tout en une petite journée! Nous tentons tout de même l'extension, et on nous dit fermement que ce n'est pas possible en Papua...



Le lendemain donc, nous utilisons les transports locaux (3 voitures, en tout 35 000 rp chacun soit environ 2 euros) et nous arrivons à la frontière à 8H du matin après 1H30 de route. Et là: mauvaise surprise!!! Nous ne pouvons entrer en PNG sans visa... Le coup du ticket, ça ne marche pas...
Humpf... Nous voilà refoulés!!! Dégoutés... Pour repartir dans l'autre sens il faut soit louer une voiture (200 000 rp) soit attendre d'autres passagers pour remplir le taxi... Nous attendons... personne... Un policier nous propose de nous ramener pour 200 000, nous négocions à 100 000 (il part de toute façon) et c'est parti... c'est du joli... Nous profitons de la corruption... c'est honteux...
Il nous dépose devant le consulat de PNG où nous expliquons que nous avons besoin d'aller à Vanimo pour faire renouveler notre visa indonésien. On nous annonce que le visa nous coûtera 1 800 000 rp!!! 120 euros!!! WHAT?!? C'est pas possible!!! L'employée, froide et antipathique, nous répond que si on ne veut pas aller dépenser de l'argent en PNG en y faisant du tourisme, c'est le prix! (c'est en fait le tarif du visa business). "Si on y va en touristes, c'est combien?" "un visa touristique c'est 225000. Mais à votre retour à la frontière si vous faites juste l'aller-retour, on vous fera payer les 1 575 000 rp de différence!"
OK bein la décision est prise: nous allons "faire du tourisme" en Papouasie-Nouvelle-Guinée... Mais attention! Demain c'est le 23 décembre, le consulat ferme à midi et jusqu'au 4 janvier! Donc demain tout doit être en règle! Il nous faut une lettre (tapée) expliquant notre programme en PNG, deux photos, et surtout: un billet d'avion de sortie du pays... Humpf... "Un billet de sortie d'Indonésie ça ira?" "Oui oui" (je me garde de préciser que c'est un billet de bateau; à Singapour nous avions acheté un aller-retour!)


au marché...


Le lendemain nous revenons avec nos dossiers complétés, et au bout de 5 heures d'attente dans une chaleur intense nous obtenons nos visas... L'employée (au sourire toujours inexistant) a bien tiqué sur le billet de bateau, l'air agacé, mais n'a pas réellement eu le choix (nos visas se terminant le 3 janvier, elle nous mettrait carrément en situation illégale)... ouf!!! quelle chance d'avoir débarqué au dernier moment! Sinon on était contraint d'acheter un billet d'avion... Imaginez le paradoxe!




C'est durant cette longue attente que nous rencontrons la gentille Joan, qui est d'ici et part passer des vacances à Vanimo, et nous propose de nous emmener le lendemain. OK! Ça marche!
C'est donc son oncle qui nous conduit à la frontière le lendemain...


Nous entrons en Papua-New-Guinea sans encombre! Wah bein ça alors! Un nouveau pays! Ici la population est mélanésienne (noirs aux cheveux parfois clairs, surtout les enfants) et parle le tok pisin (pidgin), une langue dérivée de l'anglais mais qui est inintelligible à nos oreilles profanes!


Le problème ici c'est que les hôtels sont très très chers (70 euros la nuit). La « famille » (de l'ami) de Joan ne veut pas nous héberger car elle a peur d'avoir des ennuis avec la police (peut-être en réalité car il n'y a pas de sanitaires). Il y a une chambre d'hôtes à 15 euros, pas cher ici bien que quatre fois notre budget indonésien. Finalement, Joan nous conduit chez Antoine, un ami Néo-zélandais qui nous propose tout de suite de nous héberger, heureux d'avoir de la compagnie pour Noël!!! Gagnant-gagnant! On est super heureux de cette rencontre, et je me mets vite aux fourneaux pour préparer un poulet au curry de Noël!


au marché à Vanimo...




Antoine est pilote de petits avions (12 places) qui relient les villages autrement inaccessibles, à part par la jungle, à pied, en plusieurs jours ou semaines... Il nous montre des vidéos de ses décollages et atterrissages sur des pistes herbeuses... Excellent! Il nous propose de nous faire profiter d'un vol si des places sont libres, et, comble du comble du voyageur qui ne prend pas l'avion, nous acceptons avec enthousiasme!!! Wah! C'est un de mes rêves de toujours! Mais l'occasion ne se présentera finalement pas, puisqu' Antoine devra s'absenter plusieurs jours... (nous laissant les clés de son appartement!) dommage... Nous appréciions sa compagnie, ses anecdotes et son humour...


Antoine


Un pays comme la PNG nous montre les limites d'une idée, et comment chaque chose est fonction d'autres paramètres... En PNG, finalement, n'est-il pas préférable de circuler par l'air, plutôt que de casser les montagnes pour construire des routes? (ce qui risque fort de se produire puisque les malais convoitent le bois et ont commencé à exploiter la jungle...)


la petite voisine Josefa, 14 ans


son petit frère


En attendant, nous voilà avec une maison, un four, un frigo, et un hamac sur une terrasse!!! Alors farniente et cuisine occidentale au programme! Hmmm du vrai pain...

leur animal de compagnie...
le pauvre...
on lui a coupé le bout de l'aile pour ne pas qu'il vole...
un oiseau...


Nous constatons que plus nous allons vers le nord-est de l'Indonésie, et jusqu'en PNG, moins c'est peuplé, moins c'est touristique, et plus nous sommes invités; toujours par des chrétiens, qui eux nous voient comme autre chose que des porte-monnaie! D'ailleurs le christianisme est autrement plus vivant que chez nous, les populations d'origine de ces îles ont été sensibles aux missionnaires qui sont venus "prêcher la bonne parole" ici... Colonisation religieuse? En tous cas ça prend, ici, et bien des gens (locaux et voyageurs) sont d'une « mission » ou d'une autre... étrange...




Angelina et sa petite


Après une parenthèse touristique obligatoire en PNG, nous rentrons en Indonésie... Ça y est on fait demi-tour!!! On a touché à la fin de notre voyage!!! On repart dans l'autre sens!!!




A la frontière côté indonésien, le problème du transport se pose encore, cette fois-ci on nous annonce qu'il faut louer, pour 400 000!!! Ou alors un Ojek (mobylette) mais 30 km avec nos sacs sur le dos... aille aille... Alors nous décidons d'être patients et arrêtons une voiture, deux voitures... Et voilà! Nous sommes pris par une famille de papous! Hé hé! On fait du stop en Indonésie!!!
Nous rejoignons Joan à Jayapura le 31 décembre, elle nous conduit dans la maison vide de son ami, qui est loin, très loin du centre ville... et nous y laisse... Nous entendons les feux d'artifices mais ne participerons pas à la fête...


bye bye!