mercredi 27 janvier 2010

WEST PAPUA:
du 1 au 10 janvier 2010:




Nous avons envie de nous enfoncer dans les terres de Papouasie. Les "colons" sont installés principalement sur les côtes, l'atmosphère y est donc plutôt indonésienne.




Dans les montagnes, la population est d'origine, de race négroïde.



En Papua se trouvent quelques unes (Korowai, Asmat...) des dernières tribus vivant dans la jungle à l'écart du monde "civilisé" Le peu de tourisme qui passe ici est tourné vers la forêt encore vierge, les montagnes, mais surtout la rencontre de ces tribus au mode de vie ancestral, qui ont vu peu, voire aucun blanc... Mais s'il y a bien une chose que nous avons comprise tout au long de notre voyage, c'est que le tourisme détruit son propre objet...

"[...] tous les anthropologues et les écrivains sont responsables d'une infection mortelle: faire connaître un endroit contribue à la destruction de ce qui le rend intéressant."
Nigel Barley L'Anthropologue Mène l'Enquête

C'est pourquoi pour nous hors de question d'aller à la rencontre de ces tribus qui vivent à l'abri de notre monde matérialiste (hors de question de les contaminer avec notre mode de vie dénué de sens et de risquer de les déconnecter de leur réalité). C'est une responsabilité lourde de conséquences que nous ne voulons pas prendre, même si cette rencontre serait sans doutes enrichissante pour nous... Mais on pense que c'est moins nocif de regarder Nicolas Hulot!!!)

Attirés pas les plus hautes montagnes D'Asie du sud-est, nous nous engageons donc dans les terres, direction une ville choisie au pif sur la carte, d'où il nous paraissait possible de mirer le Puncak Jaya (4884m).



Le trajet (250km) se fait en 4x4 pick up, 4 passagers dans l'habitacle (dont moi), et environ 7 à l'arrière, en plein vent assis sur des planches sans dossier (dont Yohan!). Bien entassés, sous une chaleur écrasante, nous partons... La voiture démarre, l'ivrogne dont le chauffeur, indonésien, essaye de se débarrasser depuis deux bonnes heures, se jette de nouveau à bord, et c'est parti... On y va!





Wah! C'est beau, les montagnes à perte de vue couvertes de jungle! Puis peu à peu la piste prend le dessus sur la route (de plus en plus défoncée) et ça saute de plus en plus: Yohan à l'arrière, se cogne et se casse le derrière... 13 heures de route comme ça, imaginez le calvaire! Nous franchissons des ponts en bois qui semblent à la limite de l'effondrement, effleurons des ravins où la route s'est écroulée, traversons (dans l'eau) de larges rivières à fort courant... Wah ça nous rappelle nos débuts!!!



Puis la nuit tombe... Huit heures dans ce cahot, impossible de dormir... Le chauffeur depuis quelque temps arrête tous les véhicules qu'il croise et demande quelque chose que je ne comprends pas... Et là il s'arrête, sépare ses gros billets des petits, et repart... Bon soit! On a l'habitude de ne pas tout comprendre de ce qui se trame autour de nous!

Nous arrivons sur un plateau et abordons un village... Tout à coup, droit devant, des ombres se détachent de l'obscurité... C'est un barrage... un barrage de fortune constitué de grosses pierres sur lesquelles sont assis des gens. Coup de frein du chauffeur. Un papou, énervé et visiblement ivre, frappe à la fenêtre, le chauffeur baisse la vitre, le papou, agressif, exige de l'argent, le chauffeur refuse. L'autre menace, s'agite, gueule pendant que d'autres s'excitent autour de la voiture. Mon coeur s'est mis à battre violemment (Putain mais qu'est-ce qui se passe?!?) Le chauffeur tente de discuter mais le ton continue de monter. J'ai peur. Les assaillants ordonnent aux passagers de descendre, et quelques uns sautent du véhicule (ce sont des papous, eux aussi...) et interviennent, tentant de calmer le jeu... Une atmosphère de violence règne. Le plus virulent (le chef de la bande?) ayant apparemment aperçu Yohan dans l'obscurité tente d'éclairer son visage avec un briquet, gueulant toujours, mais son briquet ne s'allume pas (merci forces cosmiques!) et un autre passager détourne son attention (alcoolisée, rappelons-le!) Ouf! A l'avant, derrière les vitres teintées, je suis cachée (mais terrorisée à l'idée que l'un d'entre eux n'ouvre la portière). Le "chef", en colère, part devant sur la route. Le passager ivrogne du début, qui a joué un rôle modérateur (même race et même état) lors de l'altercation pousse les pierres du milieu de la route et saute dans la voiture, qui accélère d'un coup, sous les cris et coups des racketteurs. Arrivés au niveau du chef, qui se tient au milieu de la route une pierre à la main, le chauffeur doit freiner à nouveau et, entre accélération et freinage, prétextant un "j'ai des passagers à conduire, je reviens, je reviens" parvient à s'esquiver... Ca y est on est sortis de ce guet-apens!

Hé bein non! Un deuxième barrage! Sans pierre celui-ci, alors le chauffeur, maintenant sa vitesse autant qu'il peut, parvient à passer. Nous évitons ainsi de nouvelles violentes démélées. La voiture se prend tout de même quelques coups et on repart cette fois pour de bon...

A partir de là à chaque attroupement sur la route (c'est monnaie courante ici) mon corps tout entier se tendra... Yohan me racontera ensuite qu'il a eu bien peur, lui aussi...

Nous arrivons à notre destination au beau milieu de la nuit, le chauffeur nous propose de dormir dans le 4x4, il fait froid, nos petites laines sont au fin fond de nos sacs à dos attachés sur le toit...
Nuit difficile donc...



Le matin, rituelle mission hôtel... Premier: 300 000 rp (20 euros!!!) What?!? C'est très cher, 6 fois notre budget habituel! Elle descend à 250 000... Heu non... Y'a pas moyen... Deuxième hôtel: 300 000 la chambre la moins chère (c'est à dire sans salle de bains privative). "Hein?!?" Non non hors de question! On va bien trouver quelque-chose de correct... Passant devant le commissariat nous montrons notre permis de circuler (c'est obligatoire) et leur demandons s'il y a un hôtel pour locaux, ils nous disent qu'il n'y a que deux hôtels ici, et que c'est le prix... et mentionnent vaguement l'église catholique (?)



Heu bon on y va, on verra bien ce qu'il y a... Effectivement à l'église catholique on nous donne une chambre, mais y'a pas moyen de savoir le prix... Nous n'insistons pas trop, c'est peut-être gratuit? ou prix libre? Après tout c'est une église...


C'est ici que nous rencontrons Yulianus le jardinier qui entretient le lieu...



Puis son beau-frère Daniel, qui nous propose de nous conduire dans son village de l'autre côté du lac. Nous acceptons, mais c'est sans compter une rencontre (fortuite?) avec la police qui nous dit que nous ne pouvons pas y aller...



Nous sommes très surpris et Daniel est en colère, le flic nous convoque au commissariat pour nous informer que notre surat jalan (autorisation de circuler) se limite à la ville, pas à la région, et que nous ne devons pas nous en éloigner. Il nous dit que c'est dangereux, qu'il y a beaucoup de primitifs et de séparatistes dans les alentours... Nous n'y croyons qu'à moitié, mais nous n'avons pas le choix... Nous devons nous résigner...

Nous retrouvons Daniel et Yulianus à l'église et lors d'une longue discussion nous découvrons le sort des papous dans un pays colonisé par les Indonésiens qui en exploitent les richesses sans en faire profiter les locaux. Un pays administré par les indonésiens qui traitent les populations d'origine comme des brutes (lien survival france). Nous découvrons le désir d'indépendance des papous et nous sommes touchés par leur situation: dépossédés de leur terre... Ils ne détiennent rien: ni commerces ni administrations... et ne sont pas libres de faire découvrir leur pays aux voyageurs, parce que l'armée entend tout contrôler.





Bon bein merci à la police, nous ne pouvons pas marcher dans les montagnes avoisinantes ni visiter les petits villages alentours... (En même temps nous n'étions pas sûrs d'être cohérents en y allant... Mais d'un autre côté il est injuste que le contact entre le blanc et le noir soit régulé par les indos...)





Nous passons donc quatre jours dans la ville, faisons deux petites randonnées (sans trop nous éloigner...) Autour de la ville c'est magnifique, et la rencontre avec la population est forte, que ce soit dans les sourires ou dans l'étonnement de nous voir. Si nous nous arrêtons dans la rue pour discuter, en une minute nous nous retrouvons avec un attroupement de 20 personnes autour de nous!!! Ceux qui parlent un peu anglais nous suivent partout et ne nous lâchent pas d'une semelle, d'autres viennent juste toucher notre peau... en toute simplicité...


au marché








notre ami Daniel












pêcheuses


La surprise de fin de séjour à l'église, c'est le tarif demandé: 150 000 par personne!!! Yulianus est gêné tout de même et nous dit de payer ce qu'on peut, alors on paye 100 000 pour deux... Bon compromis...


Légère appréhension pour le retour en 4x4, bien qu'atténuée par le fait que cette fois nous voyageons de jour. Encore un barrage, que le chauffeur parvient à passer sans s'arrêter. Climat de violence: coups sur les vitres de la voiture: sursaut, tension. Puis un barrage de jeunes armés d'arcs et de flèches pour prendre d'assaut la voiture, et on se retrouve avec 15 personnes supplémentaires (ça fait presque 30 en tout!) et on n'avance plus mais ça leur est complètement égal. On roule à deux à l'heure jusqu'au prochain village (le village critique de l'aller). Nouvelle tentative d'invasion du véhicule mais le chauffeur explique qu'il doit s'arrêter pour prendre des passagers un peu plus loin. Les papous, furieux, doivent se résigner, mais ils suivent la bagnole jusqu'à la station de police. Nous y faisons une halte, qui donnera lieu à de vives négociations, pour mettre de l'ordre dans les passagers (permettre à ceux qui ont payé d'entrer dans la voiture!) sous le contrôle d'un impressionnant papou armé d'une matraque qui sert d'intermédiaire entre les forces de l'ordre et la foule (bordélique, agitée, désorganisée, ingerable...) et se fait payer un petit billet au passage... Bien que nous soyons au commissariat, la police ne fait pas figure d'autorité. Ils sont même en position de faiblesse: peu nombreux, pas rassurés.



Pour pouvoir repartir sans conflit, le chauffeur doit donner quelques billets à des papous ivres...

Pour nous tout ceci n'est pas rassurant, nous plaignons un peu les indonésiens qui subissent ça chaque jour, et ne savons pas trop comment nous sommes perçus par ces rebelles, comme un espoir d'aide extérieure à la libération ou bien comme de l'argent potentiel... Face à des ivrognes, difficile de savoir...



Nous sommes déposés chez l'oncle de Daniel dont il nous a donné l'adresse. C'est une cabane très sommaire, coucher à même le plancher, toilettes un trou dans le jardin, douche au puits.



Il est déçu que nous ne restions qu'une nuit alors nous pesons le pour et le contre et décidons de renoncer à notre plan original (visiter Manokwari, lieu touristique à treks) pour vivre chez des papous et apprendre à les connaître. Nous décidons de rester, mais très vite nous sentons que l'invitation n'est pas désintéressée alors après avoir vu le prix des hôtels, nous tentons la location à la semaine et trouvons une petite chambre vide (pas de lit, juste du carrelage) pour 100 000 la semaine (contre 300 000 la nuit d'hôtel!) Nous passons donc la semaine dans un petit quartier populaire indonésien en plein centre ville, près d'une petite rivière qui fait office d'égout, et de décharge.



On s'habituera jamais à la vue des riverains qui sortent de chez eux, poubelle à la main, et la jettent directement dans la rivière, devant le pas de leur porte...

Il n'y a pas grand chose à faire dans cette ville. Nous nous baladons sur la plage, où notre rivière-égout finit sa course... C'est une véritable déchetterie où les enfants jouent à la marchande avec les flacons et bouteilles vides...







Il fait très chaud et nous nous souvenons avoir croisé pas mal de larges rivières en 4x4, alors nous avons envie de nous baigner... Nous marchons au hasard des kilomètres, demandons par-ci par-là, et nous retrouvons face à des militaires dans leur tour de guêt au coin de leur clôture barbelée... Ils nous font venir et nous disent "c'est loin! pas possible par là!" L'un d'eux nous prie de le suivre... Comme il est sympathique nous y allons et traversons l'immense caserne avec ses complexes sportifs, ses beaux gazons, et, côte à côte, sa mosquée, son église, et son temple hindou! C'est le luxe ici! Il nous conduit à son supérieur qui nous fait monter dans un gros camion de chantier qui va à la rivière! Nous sommes déposés près d'un petit sentier qui mène à une cascade!!! Là: baignade super fraîche qui nous fait renaître!!! Un pur bonheur!






Mais c'est pas tout ça, nous sommes en zone interdite et devons pointer à notre retour!!!


un cimetière chrétien







La petite semaine ici est l'occasion de rencontres sympathiques avec des papous et des indonésiens, deux parties en conflit mais que nous apprécions chacune, car au fond, toutes ces personnes ont un coeur! Les nombreux enfants du voisinage nous font la fête à chacun de nos passages, ils sont ADORABLES!!!






Puis entrant au Warnet (cybercafe) nous nous retrouvons (presque) nez-à-nez avec un blanc! Wah ça faisait un moment! "where are you from?" "from France and you?" "from Russia!" et bla bla Vasily nous raconte qu'il voyage à pied et en stop, et dort soit invité chez les locaux, soit dehors!!! Ca c'est du crevard! Son sac à dos est minuscule... Humpf finalement on ne s'encroûterait pas un peu???

Nous l'invitons à dormir chez nous la dernière nuit et il décide de nous suivre à Makassar pour faire étendre son visa...

Vasily nous propose d'aller au port (trentaine de kilomètres) en stop, nous partons mais il commence à faire nuit. Petit arrêt près du terminal des ankutan (mini-van transport public) pour mettre notre poubelle au feu, et Yohan se fait interpeller par un gros papou ivre et énervé qui déclare travailler pour le gouvernement et exige nos passeports. Hors de question de donner nos passeports à un homme dans cet état, nous refusons. Il s'énerve encore plus et gueule, montrant des signes de violence. Vasily intervient, il est carré et imposant et le gars a l'air intimidé, du moins un court instant. Nous reprenons notre marche et le gars nous court après en hurlant et menaçant. Un attroupement se forme autour de nous, tous les ojek (mobylette taxi) s'arrêtent et les passants aussi. Et la police... Nous en profitons pour nous échapper et reprendre notre route jusqu'au port avec l'aide généreuse d'une amie de Vasily.




Vasily


Steven


Yohan!

8 commentaires:

  1. VOUS ETES COURAGEUX ,JE VOUS TROUVE SUPER .

    à bientot bises LA MALIE

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  2. waouwww je suis sur le cul quel bonheur de vous lire!!! et quel courage ç'est génial ouai ouai ouai JADORE!!!!! bisous les routards!!!

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  3. Super récit... ça a l'air vraiment la zone la papouasie...!

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  4. Non, j'en rajoute un peu vu comme mon commentaire de ce matin a été bref... Ce que je trouve chouette c'est que vos textes sont clairs et concis, ça se lit tout seul et les photos complètent vraiment bien celui-ci. D'autre part, j'aime beaucoup les questions que vous posez, ce sont souvent les bonnes, et je partage souvent votre point de vue sur le pays... Franchement il faut continuer, vous nous apportez beaucoup grâce à ce blog!
    ...
    seul bémol quand même: Yohan, ta nouvelle petite amie a l'air sympa, mais peut-être un peu vulgos, enfin je dis ça moi... ah ah

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  5. C'est quoi ces jolies fleurs sur la photo des pêcheuses?

    Moi non plus, pas trop fan de la nouvelle copine de Yo! lol

    Bon que dire, si ce n'est que c'est vraiment triste ces poubelles à n'en plus finir... :-(

    Faites bien attention quand même, et puis mettez vous un peu de terre sur le visage de temps en temps! ;-)

    Bisous et Yo, profite bien de tes parents, et Lara de la belle famille!
    Je vous aime!
    Carine

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  6. merci beaucoup pour les commentaires!!!
    les fleurs, ce sont des jacynthes d'eau. c'est envahissant, mais c'est joli!
    merci fred, venant de toi (qui ecris), ca fait plaisir...
    yep yep!

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  7. Quoi autant de retard que ça moi ???? Pff la conjugaison de Zoé ça me prends du temps !
    Bon Lara, la concurence est rude en effet ... Tu nous en a ramené des bizarres mais jamais des comme ça ! LOL !!!!
    Enormes bises a vous ...
    Bonne suite ou que vous alliez ...
    Cécile & Co

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  8. bon les amis... nous nous devons de préciser que la nouvelle copine de yo, elle n'est pas vulgaire, c'est juste un homme... désolés!

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